Rhizome : Pouvez-vous définir le « décrochage scolaire » ?
Sophie Chirat : Nous pouvons dire que ce phénomène est ancien puisqu’il remonte au début du 20e siècle. Auparavant, une partie de la population était touchée par ce phénomène puisque les enfants de paysans décrochaient à certaines périodes de l’année, en fonction des saisons et des récoltes. Ils étaient eux-mêmes décrocheurs même s’ils n’étaient pas dénommés comme tel. Il faut attendre la massification de l’école et la crise des années 70 pour que le décrochage scolaire devienne un problème de politique publique. Le décrochage actuel est associé à la crise de l’emploi et au chômage des jeunes qui a débuté au début des années 1980. À partir de ce constat, le thème de l’insertion va s’imposer progressivement dans les textes réglementaires et législatifs du ministère de l’Éducation Nationale.
Le terme d’insertion est développé à la même période pour étudier la corrélation formation-emploi (Tanguy, 1986). Des études en sociologie et en économie vont déboucher sur la mise en place d’actions ou de structures : plan « 60 000 jeunes » en 1984, dispositif d’insertion des jeunes de l’Éducation nationale (DIJEN) en 1986, mission d’insertion des établissements scolaires (circulaire-92-143 du 31 mars 1992), qui fut transformée en mission générale d’insertion (circulaire-96-134 du 10 mai 1996) pour devenir depuis avril 2013 la mission de lutte contre le décrochage scolaire (MLDS). (…)