Certains intervenants sociaux et psychologiques sont engagés depuis dix ans dans la lutte
contre un problème public qu’ils ont contribués à identifier : l’authentification dans un monde
à la fois globalisé mais aussi de plus en plus fragmenté (migrations subies ou désirées,
surgissement des mégapoles, peurs sécuritaires) de vulnérabilités psychosociales non
réductibles aux pathologies mentales. Cet engagement est devenu une partie non négligeable
de leur travail dont l’aboutissement ne semble jamais atteint. Les personnes vulnérables sont
dorénavant identifiées à partir des faisceaux enchevêtrés de difficultés multiples qui les
caractérisent en tant que situation singulière même lorsque la dimension collective est
présente (précarité, travail, famille).
Avec cette notion de vulnérabilité se joue une interrogation centrale autour de la constitution
de l’autonomie d’individus privés de parole propre mais qui sont conviés à jouer le jeu des
nouvelles règles du social (Astier, 2008). Ces règles apparaissent à première vue sous la
forme de mots d’ordres contradictoires : accéder à l’indépendance par l’intermédiaire
d’accompagnant, gagner la confiance d’autrui en vue de s’accomplir soit même, se réaliser
dans la vie sociale et gérer ces addictions. Une analyse plus attentive montre que ces ordres
contradictoires acquièrent parfois un sens en situation, celui de l’ajustement entre épreuves
individuelles et attentes sociales. Des dispositions personnelles à s’accomplir tentent de
s’accorder à des manières de vivre ensemble sans que les aspirations à être soi ne s’opposent
« trop » aux attentes et aux règles collectives du vivre ensemble.
Tels sont quelques uns des enjeux de société auxquels sont confrontés les intervenants
psychosociaux mais aussi les usagers. Cet article a pour ambition de rendre compte de
quelques aspects nouveaux de cette réalité en relation avec une visée plus démocratique des
interventions psychosociales. Quel sens attribuer à cette forme d’agir ? (…)