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Edito

Jean FURTOS

Année de publication : 2007

Type de ressources : Rhizome - Thématique : SANTE MENTALE, SCIENCES HUMAINES, TRAVAIL SOCIAL

Télécharger l'article en PDFRhizome n°26 – Ordonner le réel sans stigmatiser (Mars 2007)

Nommer, désigner, classifier fait partie de l’expérience commune. Mais la catégorie, puisqu’il faut bien  appeler cette activité de pensée par son nom, est affligée d’une ambivalence native : elle reconnaît la place, et c’est sa gloire, mais elle rétrécie le champ des possibles, voire elle stigmatise, et c’est cette perversité qui donne à certains la peur et le refus « des étiquettes ».

Ce numéro est construit autour de l’exploration des catégories cliniques, sociales, médico-sociales, en s’affrontant à cette ambivalence par diverses entrées.

– « Votre fils est autiste », « je suis schizophrène, bipolaire »; oui, d’accord, mais pas seulement ! Certains textes nous rappellent en outre comment s’est construite la classification américaine des maladies mentales, le DSM III-R, et l’on sera surpris par l’emprise des facteurs externes à la science médicale sur l’émergence des nouvelles catégories.

– Quant au « handicap psychique », il permet une vraie reconnaissance en termes de droit, alors même qu’une authentique stigmatisation perdure.

– Passer du statut de « sans domicile stable » à celui de « sans domicile fixe », « donc » à un homme ou une femme « de la rue », cela construit une mentalité collective, cela porte sans doute de nouvelles formes d’identité. Le passage d’une catégorie à une autre entraine-t-il une errance, une construction  identitaire : suis-je Rmiste, chômeur, pauvre, malade mental, SDF, citoyen malgré tout ? Peut-on transformer une stigmatisation en force d’action ?

Et cette question obsédante : comment ne pas assigner l’individu catégorisé à cette place stigmatisée et laisser un espace au sujet, à sa fluidité créatrice, à ses systèmes de débrouille ? Peut-être en restant attentif au 3ème temps de la catégorie selon Saül Karsz : son ratage, le fait qu’un reste demeure, quoiqu’on dise et quoiqu’on fasse…

On ne peut oublier la question de l’usage politique des catégories et de leur extension débridée: une catégorie peut creuser les différences et les antagonismes, ou les effacer, ce qui n’est pas mieux ! On peut en approcher les enjeux sociétaux à propos de la controverse sur les chiffres du chômage : cette catégorie hyper sensible peut donner le doute et le vertige sur les manières d’identifier un groupe important, fluctuant selon les modes de comptage et l’évolution des situations.

Pour terminer sur les pratiques, je citerai Claude Louzoun : faut-il dynamiser ou dynamiter les catégories qui orientent la clinique et l’action sociale ? Les deux, mon capitaine !

Ne pas sacrifier au seul démon de la critique en sauvegardant la possibilité de penser le monde, d’y avoir une pratique honnête, d’y garder la force d’agir contre la tyrannie (d’un excès d’ordre), tel est le souci de notre contribution.

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