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Besoin-Demande-Désir

J.L GRABER - Pédopsychiatre

Année de publication : 2000

Type de ressources : Rhizome - Thématique : Pédopsychiatrie, SCIENCES MEDICALES

Télécharger l'article en PDFRhizome n°2 – Métamorphoses de la demande et engagement dans le soin (Septembre 2000)

J.L Graber a tenu la gageure d’exposer succinctement l’essentiel d’une trilogie classique à laquelle il est non moins classique de se référer dans le sens d’une demande d’analyse mais plus largement d’une demande de soins.

Souvent confondues dans le langage courant en ce qu’elles énoncent les états de manque du sujet parlant, ces trois notions gagnent à être  différenciées en psychologie humaine.

Le besoin ou le malaise du corps.

Sensation de tension interne exigeant une satisfaction immédiate avec un objet spécifique, le besoin est l’expression de la pulsion d’auto conservation vouée à la répétition (faim, soif, mais aussi emprise, fuite). Il s’agit d’un concept limite, presque de laboratoire, puisqu’en réalité, le besoin ne peut se passer de l’Autre pour se réaliser, en particulier chez le petit enfant. Ce concept est utile dans la clinique des conduites addictives et rend compte du fait que le toxicomane est tout autant dépendant du manque que du toxique qui comble le manque…

La demande, ou la quête de l’Autre…

La demande est plus que la simple expression d’un besoin et ne peut se réduire à  la demande d’un objet car elle vise au delà de l’objet en ce qu’elle s’adresse à un Autre et qu’elle trouve toujours en son fonds une demande d’amour, suffisamment radicale pour qu’elle soit insatisfaite.

S’adressant à l’Autre, énigmatique dans sa réponse, la demande s’inscrit d’emblée dans le désir de l’Autre et se nourrit de la relation intersubjective dans la dialectique de l’offre et de la demande.

………à travers l’objet….

L’objet de la demande n’est pas rien ; il devient le signifiant de l’échange intersubjectif et du désir de l’Autre. Perdue sitôt qu’arrivée, la satisfaction qu’il apporte, mémorisée, est vouée à la répétition avec des objets substitutifs et leurrants.

……..par la médiation des mots…

Demander implique de parler (avec le risque de refus de l’Autre) et de se plier à l’arbitraire du langage. Demander n’est pas facile . On s’expose à l’insatisfaction. Celui qui se plaint ne demande rien ; il se satisfait de l’étalage de son propre manque. L’enfant psychotique, lui, ne se risque pas à demander. Il s’auto-satisfait lui-même avec l’objet et son mutisme témoigne de son refus de langage en tant que loi primordiale « moi tout seul sans autre ! » ou « plutôt mourir psychiquement que faire allégeance à l’Autre du langage ».

Le désir de l’Autre
Le désir se déploie dans l’au-delà de la demande. Il ne vise pas un objet. S’étayant sur la pulsion et le besoin, il vise cette part d’altérité non réductible au même. Désir de communiquer, d’être en relation, d’être reconnu ou désiré, désir de connaître et de comprendre… ; il est désir de l’Autre , mais d’un Autre barré, manquant, soumis à la  loi. L’appel à l’Autre est toujours tentative de combler son propre manque-à-être  inhérent à la condition  humaine et qui repose sur deux limitations. D ‘abord l’interdit de jouir du corps de la mère qui pousse le petit enfant à renoncer à son omnipotence ; et ensuite, du fait même que nous parlons, nous souffrons d’un manque-à-être représenté dans  ce que l’on dit.  Il existe  un écart entre la tension qui nous pousse à parler et les pauvres mots que l’on utilise pour le faire. Le pronom qui nous désigne dans l’énoncé (le je) est ridicule dans sa prétention à nous représenter.

Le désir, en partie inconscient, est permanent, indestructible, repérable dans les répétitions, les rêves, les symptômes, mais aussi dans les mouvements de joie quand il se réalise.

A contrario, l’envie est un ersatz de désir. Elle est l’illusion de croire que la possession de l’objet ou de l’autre pourrait combler le manque-à-être.

Terminons ce bref voyage par un retour à la demande et précisément dans sa forme négative : la non demande (d’aide, de soin, etc…) alors même que la personne en souffrance « en aurait besoin ». Point de butée et d’impuissance des soignants ou des travailleurs sociaux, elle devrait les inviter à s’interroger sur leur offre (besoin de normaliser ?). La main tendue est insuffisante si elle ne s’accompagne pas de paroles explicitant l’offre et d’écoute de ce que l’autre met en jeu de son désir et de sa liberté dans un apparent refus d’aide.

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